Mesurer la satisfaction des parties prenantes en contexte de collaboration avec des OBNL
Mythe et légende sur la collaboration
La collaboration est un terme relativement présent dans nos univers, mais connaissons-nous réellement sa définition? Sa composition? Ses impacts? Les moyens de la mesurer?
Les chercheur·es de l'Observatoire québécois de recherche sur la collaboration (OQRC) ont élaboré la définition suivante :
«La collaboration est un processus qui prend place dans un espace formel organisé de rencontres et de dialogue où les enjeux, les tensions et les paradoxes de parties prenantes aux intérêts et expertises différentes s’expriment [...], visant une finalité commune tout en y créant son sens propre.»
— Coulombe et Harvey, 2022; Coulombe et al., 2023
Soutenir la cohérence d’un processus collaboratif revient entre autres à s’assurer qu’il réponde aux attentes de ceux et celles qui y prennent part, d’où la pertinence de mesurer la satisfaction des parties prenantes à différents moments au cours de la collaboration. Pour autant, bien trop souvent, cette rétroaction est recueillie en fin de projet et trop tardivement pour permettre des ajustements. Cependant, quand cette mesure coïncide avec le caractère transversal de la collaboration, elle agit itérativement tout au long du cycle de vie du projet. Dès lors, la satisfaction des parties prenantes n’est plus une finalité et peut soutenir les prestataires de services en les orientant dans la construction de liens de confiance intra-projet, si précieux à son succès.
Pourquoi mesurer la collaboration?
Les contextes de collaboration avec les OBNL mettent en exergue l’importance accordée aux relations d’affaires pérennes, qui soutiennnent un environnement dépendant des subventions gouvernementales. En effet, la dotation publique peut représenter jusqu'à 60 % de la structure financière des OBNL, ce qui implique qu'ils se retrouvent partiellement contraints d'adapter leur fonctionnement interne aux exigences des cahiers des charges gouvernementaux, pour lesquels le financement par projet est plébiscité :
«Le financement par projet est de plus en plus demandé par les gouvernements et bailleurs de fonds. Mais c’est essayé d’entrer la mission dans des petites cases.»
— Luc Desjardins, directeur général du Groupe communautaire L’Itinéraire
Dans ce contexte, créer des liens entre ces «petites cases» brise les silos au bénéfice d’approches holistiques, favorables à la mission des OBNL. C’est à cet endroit que les processus de collaboration jouent un premier rôle, notamment en activant les échanges communicationnels.
Pour OROKOM, le succès d'une organisation repose en partie sur une communication efficace, efficiente et responsable qui consiste à concevoir et transmettre ensemble des messages clairs, adaptés aux parties prenantes et dont l'impact environnemental est maîtrisé. C’est à travers cet «ensemble» que la collaboration avec les OBNL prend tout son sens et s’incarne dans les projets qui nous offrent l’opportunité d’établir avec et entre nos parties prenantes un dialogue débouchant sur le tissage de relations durables qui, lorsqu’elles grandissent et génèrent de la confiance, ont le potentiel de soutenir la création de valeur partagée.
À cet égard, la consultation et l’implication comptent parmi les moyens que l'équipe d'OROKOM privilégie pour favoriser la cocréation de solutions adaptées à la réalité de sa clientèle dans une approche de communication responsable. Plus précisément, nous considérons que le succès d’un projet se situe à plusieurs niveaux et impacte autant l’organisation et son milieu d’affaires que son environnement sociétal. Nous devons donc veiller à l’implication continue et adaptative des acteurs·rices internes et externes tout au long du projet, notamment en nous portant garant·es d’un processus de collaboration qui rencontre les attentes de l’ensemble des parties prenantes.
Comment s'y prendre?
Vérifier l’atteinte des expectatives par la mesure de la satisfaction requiert d’utiliser un outil de collecte de données reflétant les représentations que les acteurs·rices des différents secteurs ont du projet. Or, la collaboration entre les secteurs privé et non lucratif génère bien souvent des dynamiques relationnelles complexes, voire vulnérables pour les quelque 50 000 OBNL québécois dont les tensions financières créent un système d’opposition concurrentiel (prenons par exemple les difficultés rencontrées pour recruter et retenir du personnel dont le salaire moyen est en deçà des autres secteurs). Cette tendance peut cependant être inversée grâce au «partenariat social», qui regroupe les secteurs privés et non lucratifs autour d’objectifs communs et philanthropiques. Dès lors, le succès d'une collaboration avec des OBNL implique d’identifier la performance de la gestion de la satisfaction des parties prenantes au moyen d'indicateurs intangibles et qualitatifs tels que ceux regroupés dans la «Fleur de satisfaction» (OQRC, 2024). Cette figure est adaptée du modèle de Oppong et al. (2017), comme traduit par Monette (2023) et adapté par Alalouf-Hall, Coulombe & Gandemer (2024) :
La «Fleur de satisfaction» comprend 12 indicateurs qui évaluent le degré de satisfaction des diverses parties prenantes impliquées dans un projet collaboratif d'OBNL. Par parties prenantes, nous entendons le panel multisectoriel des OBNL, des bailleurs de fonds, des bénéficiaires, des participant·es et des partenaires du secteur privé tel qu’OROKOM. Chaque indicateur, représenté par un pétale de la fleur, englobe un ensemble de questions spécifiques qui forment le corpus du sondage de satisfaction.
À quels résultats s'attendre?
Il y a fort à parier que les données, au-delà des métriques, auront une couleur expérientielle rendant compte d’un vécu-projet qui, partagé aux parties prenantes, pourrait devenir l’élément central d’une communication transparente stimulant les échanges! En effet, la mesure de la satisfaction élaborée conjointement entre acteur·rices internes et externes peut créer une zone de coconstruction dans laquelle chacun·e, au-delà de son apport, trouve un bénéfice d’apprentissage émancipateur. Sans compter que maintenir un suivi régulier de la satisfaction tout au long du projet consolide la relation partenariale, favorisant ainsi l'harmonisation des relations et des besoins des parties prenantes. Enfin, comme le souligne le «Cycle de la Fleur de satisfaction en contexte OBNL» (OQRC, 2024) ci-dessous, la croissance de ce lien de confiance aboutit à une séparation de fin du projet qui n’altère aucunement les liens commerciaux.
En définitive, il est essentiel d’amorcer la mesure de la satisfaction dès le début du projet afin d'identifier les attentes initiales et d'en suivre les évolutions. L'itération de cette mesure permet non seulement d'ajuster les stratégies organisationnelles en cours de route, mais aussi de façonner la relation avec les parties prenantes chemin faisant, telle que l'esquisse la «Fleur de satisfaction». Nous croyons qu'adopter cette approche permet de s'aligner avec les structures partenaires et facilite la collecte de données dans le contexte des OBNL. De surcroît, impliquer les partenaires dès l'élaboration méthodologique a le potentiel d'ouvrir un dialogue dynamique, renforçant engagement et collaboration.
Si vous souhaitez tester la version complète du sondage de satsifaction des parties prenantes, veuillez contacter Caroline Coulombe.
Bibliographie
Coulombe, C. et Harvey, J. (2022). La mutation organisationnelle orchestrée dans une pratique collaborative des équipes en contexte pandémique: l’effet véloce des tensions. Ad machina, 6, 13-25.
Coulombe C., Harvey, J., Haineault, C., Monette, J. et Leroux, M. (2023). A new project performance indicator: research action for measurement of stakeholder collaboration in major public infrastructure projects. EURAM, Dublin, Ireland, Paper ID: 1898.
La chasse aux travailleurs des OBNL, (2022), La Presse+.
Cet article a été corédigé par Élodie Malroux, Caroline Coulombe, Barbara Gandemer, Diane Alalouf et Jonathan Harvey.